Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/214

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lution de Naples, vient de me conter cet événement bizarre :

« Une femme de génie régnait à Naples. D’abord admiratrice passionnée de la Révolution française par jalousie contre quelqu’un, bientôt elle comprit le danger de tous les trônes et la combattit avec fureur. Si je n’étais pas reine à Naples, dit-elle un jour, je voudrais être Robespierre. Et l’on voyait, dans un des boudoirs de la reine, un immense tableau représentant l’instrument du supplice de sa sœur.

« Saisi de terreur au bruit des premières victoires de Bonaparte, le gouvernement des Deux-Siciles implora et obtint la paix. Un ambassadeur républicain arriva à Naples, et la haine redoubla chez le faible humilié.

« Un vendredi le roi vint au théâtre des Florentins voir Pinotti, le célèbre acteur comique. De sa loge, qui était à l’avant-scène, il remarqua le citoyen Trouvé, placé précisément en face. Le citoyen ambassadeur portait le costume de sa cour : les cheveux sans poudre et le pantalon collant. Le roi sort, effrayé de voir des cheveux sans poudre. On remarquait au parterre quinze ou vingt têtes noires. S. M. dit un mot à l’officier de service, qui appela le fameux Cancelieri,