Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/247

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par son ambassadeur. Un excellent homme, dont jamais je n’oublierai ni ne prononcerai le nom, m’a offert de me cacher dans sa maison. Je le voyais pour la cinquième ou sixième fois, et lui-même est fort mal noté. Voilà de ces traits qui attachent à un pays. À Bologne, j’aurais demandé ce service à cinq ou six personnes : mais Bologne n’a pas eu deux ans de supplices, de 1799 à 1801. C’est bien à la légère que les polices me pourchasseraient : je les méprise un peu sans doute ; mais, en supposant que j’eusse trouvé légitimes les projets formés contre elles, j’aurais considéré que les menées politiques sont un peu sujettes à être découvertes dans ce siècle-ci, et qu’en cas d’irréussite la vanité nationale, blessée, n’eût pas manqué d’attribuer tout le mal à un étranger.

Du reste, j’ai la plus haute vénération pour les patriotes napolitains. On trouvera ici l’éloquence de Mirabeau et la bravoure de Desaix. Il est hors de doute à mes yeux qu’avant 1840 ce pays aura une charte. Seulement, comme la distance est immense entre un homme du mérite de M. Tocco et le bas peuple, la haute classe fera plusieurs fois naufrage avant de donner la liberté à son pays. Voir les mœurs antiques dans Gli Sposi promessi, roman de M. Manzoni.