Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/280

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séjour tend à affaiblir l’âme, à la plonger dans la stupeur ; jamais d’effort, jamais d’énergie, rien ne va vite. La plus grande nouvelle de Rome, c’est que Camuccini vient de finir un tableau. Je vais voir cette Mort de César : c’est du mauvais David. Ma foi, j’aime mieux la vie active du Nord, et le mauvais goût de nos baraques.

Il est vrai que rien ne serait supérieur à la vie active entremêlée, dans les repos, des jouissances de sympathie produites par ce beau climat de Rome.

Ce qui achève de me mettre en colère, c’est que, dans toutes les loges où je vais, on trouve très-beau cet indigne spectacle. Les Romains ont une vanité bien comique ; ils disaient ce soir : Quel cantar è degno di una Roma ! C’est leur tournure emphatique pour nommer Rome ; ils n’en emploient jamais d’autre. Je me retire navré de cet avilissement complet. Je cherche un volume de Montesquieu ; je me rappelle enfin qu’hier on me l’a confisqué à la douane comme un auteur des plus défendus. Je découvre dans un recoin de mon écritoire une Grandeur des Romains, in-32. Je lis quelques chapitres ; j’ai du plaisir à augmenter l’humeur sombre qui me possède ; vers les deux heures, je suis à la hauteur d’Alfieri. Je lis tout Don Garcia avec un vif plaisir : il ne m’arrive