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ROME, NAPLES ET FLORENCE

n’y a pas de mœurs différentes. Tous les Italiens parlent des mêmes choses, chacun suivant son esprit : c’est un des traits frappants de l’état moral de ce pays ; la conversation du plus grand seigneur et celle de son valet de chambre sont la même.

29 août. — Je jouis de ma loge au théâtre d’Argentine. Ce n’était pas la peine de tant s’intriguer. L’on nous donne le Tancredi de Rossini. La pièce n’aurait pas été achevée à Brescia ou à Bologne. L’orchestre est pire que les chanteurs : mais il faut voir le ballet. La troupe de danseurs qui charme Rome avait grand’peine à se faire souffrir, il y a six mois, à Varèse, petite ville de Lombardie.

Ici, chacun orne sa loge à son gré : il y a des rideaux en baldaquin, comme pour une fenêtre à Paris, et un devant de loge en étoffe de soie, velours, mousseline ; il y en a de bien ridicule, mais la variété est agréable. Je remarque trois ou quatre draperies qui rappellent de loin une couronne : on m’explique que la vanité des pauvres têtes couronnées qui habitent Rome, y trouve une consolation. Tout est décadence ici, tout est souvenir, tout est mort. La vie active est à Londres et à Paris. Les jours où je suis tout à la sympathie, je préférerais Rome : mais ce