Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/298

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l’illusion, c’est que les décorations de ce petit théâtre sont excellentes. Les portes et les fenêtres des maisons qu’elles représentent sont soigneusement calculées pour des acteurs qui, au lieu de cinq pieds, ont douze pouces de haut.

Le personnage à la mode parmi le peuple romain, celui dont il aime à suivre les aventures, c’est Cassandrino. Cassandrino est un vieillard coquet de quelque cinquante-cinq à soixante ans, leste, ingambe, cheveux blancs, bien poudré, bien soigné, à peu près comme un cardinal. Du reste, Cassandrino est rompu aux affaires, il ne se fâche point : à quoi bon dans un pays sans insolence militaire ? Il brille par l’usage du monde le plus parfait ; il connaît les hommes et les choses ; il sait surtout ménager les passions du jour. Sans toutes ces qualités, le peuple romain l’appellerait villano (paysan) et ne daignerait pas rire de lui. En un mot, Cassandrino serait un homme à peu près parfait, un Grandisson sexagénaire, s’il n’avait pas le malheur de tomber régulièrement amoureux de toutes les jolies femmes que le hasard lui fait rencontrer ; et, comme c’est un homme du Midi qui ne s’amuse pas à rêver l’amour, il veut les séduire. Vous conviendrez que ce personnage n’est pas mal inventé pour un pays gouverné par