Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/9

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de prime abord deux ou trois phrases bien athées, et allant ensuite prendre une glace à côté de sa maîtresse qu’il ne quitte plus de toute la soirée. — Un cardinal parlant mal de Dieu, Éminence, cela est à peu près aussi vraisemblable qu’un conseiller d’État de Napoléon médisant du système continental. »

La supériorité d’un cardinal est tellement incontestable, en terre papale, que, pour peu que ce personnage ne soit pas le dernier des hommes, il a de la bonhomie. Un cardinal crée le souverain deux ou trois fois en sa vie, et, du reste, se moque de toutes les lois. J’ai eu la gloire d’inspirer au cardinal Lante l’envie de parler. Il dit à un étranger, par imprudence et besoin de sfogarsi (to give vent to his passion), des choses qu’il éviterait avec un habitant de Bologne. Il me questionne de préférence sur des ridicules que je n’aimerais pas qu’on trouvât décrits dans mes papiers. Hier, après m’avoir parlé une heure : « Allons, monsieur, me dit-il, il faut de l’égalité dans le commerce. Payez-moi mes contes sur Rome par des anecdotes sur Paris. Par exemple, quel homme est-ce que monsieur I-o-bez-dou-i-ou-ra ? » J’ai été fort embarrassé ; je ne comprenais pas du tout, et le cardinal croit parler français supérieurement. Pendant que je cherchais