Page:Stendhal - Vie de Napoléon.djvu/175

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Quand l’empereur était à l’armée ou en voyage, les ministres, qui ne le suivaient pas, envoyaient leurs portefeuilles au duc de Bassano qui présentait les décrets à Sa Majesté, et lui faisait lecture des rapports. On voit l’origine du crédit de ce duc, qui d’abord n’était que simple secrétaire, qui peu à peu se mit à la queue des ministres dans l’almanach impérial, et qui n’eut jamais de département.

Le crédit tout puissant du duc de Bassano était sur les ministres et préfets auxquels il faisait peur. Personne n’avait de crédit sur Napoléon pour les affaires qu’il pouvait comprendre. Ainsi tous les décrets d’organisation, tout ce qui était du domaine de la raison pure, si je puis m’exprimer ainsi, annonçaient un génie supérieur. Quand il y avait des données nécessaires à savoir, si le ministre du département que cela regardait était d’accord avec le ministre secrétaire d’État, on le trompait dans le premier exposé de l’affaire, et par orgueil et par paresse, il ne revenait jamais.

Quant aux décrets de personnel, Napoléon avait adopté des règles générales fondées sur un extrême mépris pour les hommes. Il semblait se dire : « Pour les gens que je ne connais pas moi-même, je serai moins trompé par leur uniforme qui,