Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/155

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classe des paysagistes, et les compositeurs d’opéras dans celle des peintres d’histoire. Deux ou trois fois seulement Haydn s’éleva à ce grand genre, et alors il fut Michel-Ange et Léonard de Vinci.

Consolons-nous, nous verrons son talent reparaître quand nous parlerons de sa musique d’église et de ses oratorios : dans ces derniers surtout, où le génie de Pindare trouve plus d’occasions de paraître que le génie dramatique, il fut de nouveau sublime, et étendit encore la gloire qu’il s’était acquise comme symphoniste.

Je m’aperçois qu’à force d’impartialité, je dis peut-être trop de mal de notre ami. Avez-vous entendu son Ariane abandonnée dans l’île de Naxos ? Toutes mes calomnies seront mises à leur place.

Il me semble que la musique diffère en cela de la peinture et des autres beaux-arts, que chez elle le plaisir physique, senti par le sens de l’ouïe, est plus dominant et plus de son essence que les jouissances intellectuelles. La base de la musique est ce plaisir physique ; et je croirais que notre oreille jouit encore plus que notre cœur en entendant madame Barilli chanter :

Voi che sapete
Che cosa è amor.

Mozart, Figaro.