Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/352

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bien chère, et dont la mémoire lui sera éternellement précieuse ; il veut célébrer tous les ans sa mort par un service solennel, et il vous demande de composer un Requiem pour ce service. » Mozart se sentit vivement frappé de ce discours, du ton grave dont il était prononcé, de l’air mystérieux qui semblait répandu sur toute cette aventure. Il promit de faire le Requiem. L’inconnu continue : « Mettez à cet ouvrage tout votre génie ; vous travaillez pour un connaisseur en musique. — Tant mieux. — Combien de temps demandez-vous ? — Quatre semaines. — Eh bien, je reviendrai dans quatre semaines. Quel prix mettez-vous à votre travail ? — Cent ducats. » L’inconnu les compte sur la table et disparaît.

Mozart reste plongé quelques moments dans de profondes réflexions ; puis tout à coup demande une plume, de l’encre, du papier, et, malgré les remontrances de sa femme, il se met à écrire. Cette fougue de travail continua plusieurs jours ; il composait jour et nuit, et avec une ardeur qui semblait augmenter en avançant ; mais son corps, déjà faible, ne put résister à cet enthousiasme : un matin il tomba enfin sans connaissance, et fut obligé de suspendre son travail. Deux ou trois jours après, sa femme cherchant à le distraire