Page:Stendhal - Voyage dans le midi de la France, 1930.djvu/235

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encore est-elle plus dans le style de l’école de Venise qu’aucune main dans les tableaux bien connus pour être de Raphaël. Cette main est peinte plus vite, plus chaudement ; elle vise plus à l’effet. La comparer avec la main du beau jeune homme qui est vis-à-vis et que je trouve tout à fait de Raphaël. La saillie de l’os du bras dans la main droite de ce duc d’Urbin, est trop rapprochée de la première saillie du petit doigt. Tout près est une excellente copie de la Madonna della Seggiola par M. Fabre. Il y a bon nombre de tableaux de lui dans ce musée et quand il ne copie pas David et Talma, il est bon.

Si l’on veut sentir tout le mérite de M. Fabre, il faut se faire mal aux yeux un instant et regarder Tullius qui fait passer son char sur le corps de son père (no 65), par M. Dandré Bardon. Voilà où en était l’école française en 1783. La délicatesse monarchique n’admettait plus qu’un tiers des mots de la langue dans le style du théâtre. Si cette monarchie eût continué, nous serions, je pense, arrivés à la politesse chinoise. Un faiseur de paradoxes pourrait soutenir que c’est par égoïsme que David a aimé la liberté et ses excès. Il est certain que la société des gens qui adoraient les vers de l’abbé Delille ne pouvait goûter ses tableaux.