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l’intérêt des commanditaires ; 2o il faut pourvoir au luxe de Madame (si le jeune négociant est marié). À Marseille, Madame sait faire la cuisine, dirige l’unique servante qui prépare les plats, au besoin fait la moitié du dîner. Rien de simple comme l’intérieur de ces ménages. À nos yeux, cela a quelque chose de respectable. Une des Marseillaises qui a le plus d’esprit (et si je la nomme, tout le monde en conviendra, même à Paris), m’a fort intéressé l’autre jour par une discussion sur les pois chiches. Elle disputait avec un Espagnol, dont le patriotisme n’entend pas raillerie sur les pois chiches.

Quand ou prend des informations à Marseille sur un négociant, on ne parle jamais de sa fortune, on répond simplement : il paye ou il ne paye pas. Cependant on sait à Marseille, à mille écus près, la fortune de chacun. On me disait hier que jamais banquier n’a fait faillite à Marseille (jamais veut dire sans doute rarement).

J’avais besoin d’argent. Au lieu d’en prendre chez un banquier, j’ai demandé le 10 du mois à un négociant, sur lequel j’avais une traite échéant le 30, s’il voulait me l’escompter.

— Nous parlerons de cela à la Bourse, m’a-t-il répondu, venez ce soir à tel numéro dans l’angle gauche.