Page:Stendhal - Voyage dans le midi de la France, 1930.djvu/314

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être resté au lit une heure et demie. Diligence qui me semble une patache tant elle est dure et le chemin mauvais ; à chaque instant, revers de pavé chargés de pierres par les dernières pluies et que l’on passe au grand trot. Odieux revers qui me font mal à la tête dans le coupé. Je me réfugie dans la rotonde où, par bonheur, il n’y a personne. Vilain paysage de montagne ; champs couverts de pierres ; je meurs de sommeil et de fatigue.

Vers les 9 heures et demie, après avoir passé une rivière et remonté une montagne qui n’en finit plus, la culture recommence ; petits murs de soutènement les uns au-dessus des autres ; j’en compte souvent jusqu’à 12 formant un système ; à la vérité, ils n’ont que deux ou trois pieds de haut. Les champs sont pleins d’oliviers, de figuiers et de mûriers. Patience de ces pauvres paysans à arranger les pierres qui les désolent. C’est ce qu’à Genève on appelle culture cananéenne, car il faut de la Bible partout pour être estimé ; beaucoup de gens en ce pays-là ont vu le pays de Canaan depuis la rivière de Gênes (Lettres de M. Lullin sur l’Italie, très judicieuses, au Canaan près).

En approchant de Grasse, la couleur des feuilles des oliviers devient d’un vert plus foncé ; ils sont gros comme des saules.