Page:Stendhal - Voyage dans le midi de la France, 1930.djvu/329

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inutile qu’un arc de triomphe devait une partie de son mérite à sa rareté. Le voyageur qui est allé de Lyon à Arles en faisant 6 lieues à l’heure a vu vingt arcs de triomphe par exemple, dont plusieurs, comme celui de Valence, sont réellement fort bien ; ce voyageur ne ferait pas vingt pas pour voir l’arc de triomphe du Carrousel.

La roche de Crussol vis-à-vis le pont est horriblement laide ; elle tombe en ruine et cette ruine n’a rien que de vilain. La rive vis-à-vis Valence est non moins plate et laide. Peut-être dans cent ans un homme de goût qui aura du pouvoir à Valence fera planter 500 blancs de Hollande, 200 platanes et 300 peupliers d’Italie sur cette rive si laide. Mais d’abord il faut voir le laid, ce qui suppose la connaissance du beau. Je me rappelle les rives de l’Elbe à Dresde. Le sommet de la montagne de Crussol qui se dessine dans le ciel d’une façon si nette après le soleil couché est également abominable.

Et avec tout cela, si j’étais condamné à habiter Valence, je me logerais dans un des champs qui dominent de 40 pieds le pont suspendu. On est là à quatre minutes de la salle de spectacle et du centre de la ville. Le faubourg Saint-Nicolas par lequel on va à Romans et Grenoble est, comme le faubourg Saunière, composé