Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/170

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sur mon âme et sur sa simplicité qu’elle n’y laissait aucune trace. J’entrai sans répugnance au couvent du Sacré-Cœur. Rien n’avait été négligé pour m’en rendre le séjour agréable. Mes parents avaient demandé pour moi des privilèges : on les avait accordés sans trop de peine. Les congrégations dirigées par les jésuites savent faire ployer la règle dans toute occasion importante : j’en étais une.

Appelée par mon nom et par ma fortune à quelque grand mariage; destinée, on pouvait le croire, à faire quelque figure dans le monde, j’étais une influence à ménager, à conquérir, pour la plus grande gloire de Dieu et pour l’avantage de l’ordre. Il n’y avait donc pas lieu de se montrer récalcitrant, ni de trop débattre les conditions que mettait ma mère à mon entrée dans le pensionnat. J’eus ainsi une chambre pour moi seule, au lieu du lit au dortoir ; un piano, pour moi seule, dans cette chambre, avec le privilège d’y prendre mes leçons de musique et d’y recevoir, sous la surveillance d’une religieuse , un vieux maître en perruque, un professeur du conservatoire, M. Adam. Il fut entendu aussi que je sortirais non-seulemenl à mon tour, et selon l’ordre établi, mais toutes les fois qu’on me demanderait, soit chez ma grand’mèreLenoir, soit chez la princesse de La Trémoïlle, soit chez ma sœur de mère, madame Auguste Ehrmann. Les réserves tant soit peu hérétiques de ma mère touchant