Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/242

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à l’hôtel Biron, une de nos professes, madame de Marbeuf, lui avait fait au parloir, en ma présence, la demande de ma main pour l’un de ses parents, qu’elle disait extrêmement riche. Quelques jours après, la princesse de la Trémoïlle, consultée sur cette ouverture, avait prononcé de son autorité souveraine, en ma présence encore, que le baron de P… était de trop petite noblesse — on appelait cela n’être pas bon ! — et qu’une fille de bonne maison telle que moi devait trouver beaucoup mieux.

J’étais donc bien avertie de ma grande valeur matrimoniale. En effet, depuis ce jour, pendant l’espace de cinq années, les propositions, les demandes plus ou moins directes, les négociations de toutes sortes, se succédèrent chez nous presque sans interruption. J’entendis nommer comme aspirant à ma main l’amiral Mackau, le marquis de Castelbajac, le comte de Marcellus, le baron de Bourgoing. le comte de Custine, à peine veuf de sa première femme, qui, au dire de la princesse de la Trémoïlle[1], grandement favorable à ce projet d’union, avait été très-heureuse en ménage.

Mon frère, qui me trouvait l’air et les manières d’une ambassadrice, aurait vu avec plaisir mon ma-

  1. À quelque temps de là, un éclat scandaleux montra que la princesse n’était pas toujours infaillible en ses jugements sur les choses et les personnes, ce qui étonna chez nous.