Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/112

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dans cet instant décisif. — Oui, s’ils eussent agi en conséquence, je suis persuadé que j’aurois figuré dans le monde tout autrement que je ne fais, et que je ne ferai vraisemblablement le reste de mes jours. — Croyez-moi, bonnes gens, ceci est un point beaucoup plus essentiel que vous ne le pensez. Vous avez, sans doute, entendu parler de certains esprits qu’on appelle esprits animaux. Vous savez, sans doute aussi, comment s’en opère la transfusion du père au fils, etc., etc. — Eh bien !… je vous donne ma parole que de dix parties du bon sens ou de la bêtise d’un homme, il y en a neuf qui dépendent du mouvement, de l’activité et des directions différentes que vous leur faites prendre au moment dont je parle. — L’essor une fois donné, bien ou mal, il n’importe, les esprits s’échappent avec précipitation ; et si l’impulsion se répète, la route qu’ils se fraient, vous le savez, mesdames, devient aussi unie, aussi douce que l’allée d’un beau jardin. — Le diable, avec toute sa puissance, ne pourroit pas les en détourner, quand une fois ils s’y sont habitués.

« Mon ami, dit ma mère, n’auriez-vous point par hasard oublié de monter la pendule ? — Bon Dieu ! s’écria mon père, qui eut soin en même-temps de modérer sa