Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/113

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voix, est-il jamais arrivé, depuis la création du monde, qu’une femme ait interrompu un homme par une question aussi sotte ? » Que dit encore votre père ? Rien.



CHAPITRE II

L’Embryon.


Je n’aperçois, réflexion faite, ni bon ni mauvais dans la question de ma mère. — Ni bon ni mauvais ? Convenez, au moins, qu’elle étoit hors de saison. Vous seriez trop heureux si elle n’eût été que déplacée. Mais, ne voyez-vous pas qu’elle détournoit, qu’elle dispersoit les esprits qui se développoient en ce moment, et dont la principale affaire étoit d’escorter, de mener, de conduire l’embryon jusqu’à l’endroit qui étoit destiné à le recevoir ?

Un embryon, monsieur, quelque petit, quelque peu important qu’il paroisse, en ce siècle léger, aux yeux de la folie et des préjugés, est pourtant quelque chose. Ceux de la raison, éclairés par des recherches et des observations scientifiques, le regardent comme un être qui a des droits, et qu’on est obligé de conserver avec soin. — Les philosophes minutieux, dont l’ame est de la même trempe