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Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/183

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malheur. — « Voyez-vous, diroit-on, si cette pauvre madame Shandy eût pu aller accoucher à Londres, ainsi qu’elle en avoit prié son mari à genoux. — Hélas ! cela ne lui seroit pas arrivé. — Ce n’étoit pas une si grande affaire, pour avoir la dureté de lui refuser une chose aussi naturelle. Ne lui a-t-elle donc pas apporté assez de bien ? — Voilà ce que c’est ! Et la bonne dame et son enfant, qui seroient encore vivans, sont morts. »

Mon père savoit qu’il ne pourroit rien répondre à ces exclamations lamentatives du public. Ce n’étoit cependant pas pour se mettre uniquement à l’abri de ces discours, ni même aussi tout-à-fait par tendresse pour sa femme et sa chère progéniture, qu’il se sentoit si inquiet sur tout ce qui pouvoit résulter de cette affaire. — Mon père avoit des vues étendues. — Il s’y croyoit intéressé pour le bien public, dans la crainte qu’on ne fît un mauvais usage d’un accident malheureux. — Il appréhendoit que les femmes ne se prévalussent d’un tel exemple pour étendre leur empire. — Elles avoient déjà assez usurpé de droits, pour qu’on se tînt en garde contre elles. N’y avoit-il pas à craindre que la réunion de tant d’avantages rassemblés ne devînt fatale