Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/258

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bouche, il n’y avoit point de fin ; rien ne pouvoit arrêter la volubilité de sa langue. Son habitude étoit d’entre-mêler toujours ses discours du titre ou de la qualité de ceux à qui il parloit, et il ne parloit qu’à la troisième personne. À dire vrai, Trim étoit assommant. Cependant son respect plaidoit si fortement en faveur de son élocution, qu’il n’étoit pas possible de se fâcher. — D’ailleurs, mon oncle ne se trouvoit que rarement incommodé de sa manière de parler ; plus rarement encore se fâchoit-il contre lui… Il aimoit l’homme, et mon oncle, mon oncle Tobie ne regardoit un domestique fidelle, que comme un humble ami. Il ne pouvoit pas prendre sur lui de le faire taire. Tel étoit donc le caporal Trim, et tel étoit aussi mon oncle Tobie vis-à-vis de lui.

Si je l’osois, continua Trim, je dirois sur cela mon avis à monsieur ; je lui expliquerais avec franchise ma façon de penser. Dis, Trim, dis, reprit mon oncle Tobie ; parle, parle sur ce sujet sans rien craindre.

En ce cas, continua Trim, en relevant ses cheveux, et en se tenant aussi droit que s’il eût marché à la tête de sa division. —

Eh bien ! en ce cas, Trim, dit mon oncle Tobie…