Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/277

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angle qui étoit formé par le mur du jardin, Obadiah et son gros cheval de carrosse tournèrent le coin subitement, et courant avec toute la vitesse imaginable, survinrent inopinément sur le pauvre docteur et sur son bidet ? — Il n’étoit pas possible de trouver une rencontre plus funeste. — Le bidet du docteur et le docteur lui-même n’y étoient pas plus préparés l’un que l’autre ; il étoit difficile de soutenir un choc aussi rude. —

Hélas ! que pouvoit faire le docteur Slop ? Il étoit prêtre, et se signa. Le nigaud ! Il auroit mieux fait de saisir le pommeau de la selle. — Cela est vrai. Il auroit encore mieux fait de s’arrêter tout court, et de ne rien faire du tout. — En se signant, il laisse échapper son fouet… Il veut le rattraper entre son genou et le bord de la selle, et il perd l’étrier. Il perd aussi son équilibre, et dans la multitude de ces pertes, le docteur infortuné perd la présence d’esprit ; et sans attendre le choc d’Obadiah, il abandonne son bidet à son destin, roule diagonalement du faîte de son cheval, et tombe comme un sac de laine, sans se blesser, et s’enfonce d’un pied dans la boue.

Obadiah ôta deux fois son bonnet pour saluer le docteur Slop ; une fois comme il