Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/479

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CHAPITRE XLVII.

Je m’égare.


Telle est l’aventure de Trim : quoique mon père la sût par cœur, il se divertissoit à se la faire raconter de temps en temps. Mais il n’en étoit pas de même de toutes les autres relations, que mon oncle Tobie entreprenoit assez souvent de lui faire. Si par malheur il prononçoit seulement une syllabe qui annonçât qu’il alloit parler de canons, de bombes, de pétards, mon père se levoit aussitôt, et l’accabloit par un éloge pompeux des machines des anciens. Il ne voyoit rien de si beau que le bélier. Les vinca (dont Alexandre se servit pour mettre ses travailleurs à couvert du siège de Tyr) lui paroissoient au-dessus de tout ce que les ingénieurs peuvent faire. N’est-ce pas quelque chose de bien rare qu’un canon ? disoit-il. Parlez-moi, morbleu ! parlez-moi de la catapulte des Syriens, qui jetoit à cent pieds des pierres si monstrueuses que les plus forts boulevards en étoient ébranlés jusques dans les fondemens. Parlez-moi du merveilleux mécanisme de la baliste, des effets terribles de la pyrobole, qui jetoit le feu de tous côtés ; de la