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Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/496

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CHAPITRE LVI.

Suite du Chapitre cinquante-quatre.


Vous vous entendez, reprit mon bisaïeul. Eh bien ! qu’entendez-vous ?… je n’ai point de nez, s’écria-t-il en portant la main sur le sien. Oh ! parbleu, madame, c’est une injure qui n’est pas concevable. Voyez, voyez aussi le portrait de mon père, et jugez si son nez n’étoit pas infiniment plus court que le mien. Mon bisaïeul avoit raison. Le parallèle lui étoit favorable : mais avec ce brillant avantage, le nez qu’il portoit n’en étoit pas moins pour tout le monde, et pour ma bisaïeule, comme le nez de tous les hommes, femmes et enfans que Pantagruel, dans le cours de ses voyages, trouva sur l’île d’Ennasin. Et si vous voulez savoir en passant comme ils étoient faits, vous pouvez lire le chapitre IX du quatrième livre de l’histoire de cet homme célèbre. Vous y verrez mot pour mot, que les habitans de l’île ressembloient à beaucoup d’autres, excepté que les hommes, les femmes et les enfans avoient le nez de la figure d’un as de trèfle. Et que c’est pour cela que l’île s’appeloit Ennasin… Cependant ma bisaïeule