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Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/501

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si, à chaque fois que je parlerai d’une chose, il falloit que je l’expliquasse.



CHAPITRE LVIII.

Ce que c’est que la propriété.


C’est un singulier bienfait de la nature, qu’elle n’ait formé l’esprit de l’homme qu’avec une heureuse défiance, une espèce de résistance contre les nouveautés qu’on lui présente. Il est vrai qu’il a cela de commun avec les dogues, les barbets, les roquets, qui ne se soucient jamais d’apprendre de nouveaux tours : mais qu’importe ? si l’humanité ne jouissoit pas de cette faveur, il n’y auroit point de sot, point d’étourdi, qui, en lisant tel livre, en observant tel fait, en réfléchissant sur telle idée, ne crût devenir un des plus grands philosophes, et être exprès formé pour renverser tout ce qui existe.

Mon père n’étoit ni sot, ni étourdi ; mais il n’en tomboit pas moins sur une opinion, comme un homme dans l’état de la nature tomberait sur une pomme. Elle lui devenoit propre ; et quoiqu’il fût homme d’esprit, il auroit plutôt perdu la vie que de la céder.

Je prévois que Didius, le grand juriscon-