Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/414

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embarras extrême ; et ne se souciant pas de rétracter son épithète, encore moins de l’expliquer, — et moins que tout cela d’ériger son conte en système à la manière des savans, — il regarda mon oncle Tobie, espérant qu’il viendroit à son secours ; mais voyant que mon oncle Tobie restoit assis en attendant un explication, il hésita un moment et continua ainsi :

« Monsieur me permettra de lui dire que le roi de Bohême étoit malheureux, en ce qu’aimant la navigation et tout ce qui y a rapport, il ne se trouvoit pas un seul port de mer dans toute la Bohême. » —

« Et comment diable y en auroit-il eu, Trim, s’écria mon oncle Tobie ? — La Bohême ne touchant à la mer d’aucun côté, cela ne pouvoit être autrement. — Cela se pouvoit, dit Trim, si Dieu l’avoit voulu. »

— Mon oncle Tobie ne parloit jamais de l’essence de Dieu et de ses attributs, qu’avec respect et retenue. —

« Je ne le crois pas, répliqua mon oncle Tobie, après une pause ; — car ne touchant à la mer d’aucun côté, — ayant la Silésie et la Moravie à l’est, — la Lusace et la Haute-Saxe au nord, la Franconie à l’ouest, et la Bavière au sud ; — la Bohême ne pouvoit