Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/449

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CHAPITRE LXII.

Les deux amours.


« Les anciens, dit mon père, ont reconnu, frère Tobie, deux sortes d’amour, très-distinctes l’une de l’autre, suivant la partie du corps où elles prennent naissance, la cervelle ou le foie. Ainsi, quand un homme devient amoureux, il doit considérer où est le siège du mal. » —

« Et qu’importe, frère Shandy, répliqua mon oncle Tobie, qu’importe d’où l’amour vienne, quand on ne veut que se marier, aimer sa femme, et lui faire quelques enfans ? » —

« Quelques enfans, s’écria mon père, en sautant de sa chaise les yeux fixés sur ma mère, et passant brusquement entre son fauteuil et celui du docteur Slop ! — Quelques enfans, s’écria mon père, en répétant les mots de mon oncle Tobie, et continuant à se promener avec agitation ! »

« Ce n’est pas, frère Tobie, dit mon père en revenant à lui, et se rasseyant derrière le fauteuil de mon oncle Tobie, — ce n’est pas que je fusse fâché de t’en voir une ving-