Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/465

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Un cristal mince, bleu, calme et brillant, sans tache, sans eau, et tellement tranquille, qu’on auroit pu appercevoir jusqu’au fond la moindre particule ou la moindre expression de désir, s’il en eût existé chez ma mère ; — mais il n’y en avoit pas le plus léger vestige. Et je ne sais comment il arrive que moi, son fils, formé de son sang, je me trouve si enclin à la bagatelle, surtout vers les équinoxes de printemps et d’automne. —

Ma mère, madame, n’étoit telle en aucune saison de l’année, ni par nature, ni par éducation, ni par imitation.

Un sang doux et sage circuloit paisiblement dans ses veines, en tout temps, le jour et la nuit, dans les occasions même les plus critiques. Son imagination calme et paisible n’étoit point échauffée par ces pratiques ascétiques, par ces lectures mystiques, qui n’ayant aucun sens en elles-mêmes, forcent l’esprit à se replier dans la nature pour leur en trouver un. Et quant à mon père, il étoit si loin de chercher à enflammer ses idées là-dessus, que son plus grand soin étoit d’éloigner de sa tête toute image ou propos de ce genre.

Au reste, la nature avoit fait tous les frais de la sagesse de ma mère, et rendu super-