Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/489

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ce qui tordoit le cou à leurs meilleurs dialogues dès la première phrase. — Ma mère ne connoissoit rien aux cunettes ni aux fausses brayes ; elle fut de l’avis de mon père.

« Ce sont des fadaises, dit ma mère. » —

« Oh ! surtout les cunettes, s’écria mon père. » Il crut avoir dit un bon mot. — Il jouit de son triomphe et poursuivit.

« Non que ce soit, à proprement parler, le terrein de la veuve Wadman, dit mon père, en se reprenant un peu, car elle n’en a que l’usufruit. » — « Cela fait une grande différence, dit ma mère. » —

« Aux yeux des sots, répliqua mon père. » —

« À moins qu’il ne leur arrive d’avoir des enfans, dit ma mère. » —

« Mais auparavant, dit mon père, il faut qu’elle persuade à mon frère Tobie de lui en faire. » —

« Sans doute, monsieur Shandy, dit ma mère. » —

« Si elle y parvient, dit mon père, — que le ciel ait pitié d’eux ! » —

« Amen, dit ma mère, piano ! » —

« Amen, s’écria mon père fortissimè ! » —

« Amen, répéta ma mère ; » mais avec une cadence, un soupir, un accent de pitié, qui