Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/349

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pourrons dire de lui : « la plante de ses pieds n’a pas trouvé une place à se reposer un seul instant. »

Au moment où, débarrassé de ses tuteurs et de ses gouverneurs, il est abandonné à lui-même, et mis sur le chemin du monde, ses premières idées se remplissent naturellement du bonheur qu’il va rencontrer ; elles lui sont suggérées par le spectacle des plaisirs où se laissent entraîner ses compagnons et ses égaux.

Voyez comme son imagination court à la suite du premier feu follet qui flatte ses désirs. Observez les impressions différentes que font sur ses sens la musique, les arts, la parure, la beauté ; comment son esprit léger voltige après les plaisirs : vous diriez qu’il n’en sera jamais rassasié.

Laissons-le quelques années à lui-même, jusqu’à ce que la pointe de son appétit se soit émoussée, et vous allez bientôt ne plus le reconnoître. Engagé dans le tourbillon des affaires, flatté de passer pour un homme d’importance, mettant son bonheur à la réussite de mille projets, pourvoyant enfin à la fortune de ses enfans et des enfans de ses enfans, il vous dira alors que les plaisirs de la jeunesse ne sont faits que pour ceux