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Page:Stevens - Contes populaires, 1867.djvu/118

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JACQUOT « LE BÛCHEUX. »


— Laisse les morts en paix, cela vaut mieux, ma femme.

— Que le bon Dieu, Jacquot, prenne en sa garde l’âme
De ton vieux défunt père, et qu’il en soit ainsi ;
Je l’ai toujours aimé, tu le sais, Dieu merci !
Mais pourquoi croirais-tu que j’eusse fait tout comme
A fait Ève jadis ?…

A fait Ève jadis ?…— Eh ! bateau ! qui le croit ?
Et quand je le croirais, te dirais-je pourquoi ?
En voilà des discours à propos d’une pomme !

— Il me semble, Jacquot, qu’on peut bien en parler.
Aurions-nous, aujourd’hui, tous deux à travailler,
Ainsi que des bêtes de somme,
Si cette folle d’Ève eût su mieux obéir ?

— Je le repète encor qui te dit le contraire ?
Mais puisque c’est ainsi, que pouvons-nous y faire,
Sinon travailler dur, pour ne pas trop pâtir ?

— C’est vrai ; mais quand, vois-tu, ça me vient à l’idée,
Je ne puis m’empêcher de me dire, à part moi,
Si j’eusse été là-bas, toute seule avec toi,
Quand même tu m’aurais priée et suppliée
De manger de ce fruit, j’aurais dit : non, mon fieu,
Puisque Dieu le défend, obéissons à Dieu.

Pendant que les époux tenaient ce beau langage,
Quelqu’un les écoutait, ravi de les ouïr,
Et ce quelqu’un était le Seigneur du village.

— Ça leur dit-il, sortant tout-à-coup du feuillage,
Vous travaillez beaucoup, vous me semblez souffrir,
Braves gens,… contez-moi vos peines.

Braves gens,… contez-moi vos peines.Jacqueline
Sans se faire prier, parla pour son époux :
Mon bon Monsieur, fit-elle avec sa voix caline,
Jacquot, moi, mes enfants, nous nous éreintons tous
Du matin jusqu’au soir, sans que notre cuisine
En aille mieux. À peine pouvons-nous