Aller au contenu

Page:Stevens - Contes populaires, 1867.djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
104
JACQUOT « LE BÛCHEUX. »

De l’an, tant bien que mal, rejoindre les deux bouts.
C’est à désespérer de la bonté divine.

— Femme, on ne doit jamais désespérer de Dieu.
C’est bien souvent, quand le moins on y pense,
Que se montre la Providence.
Elle-même aujourd’hui, m’a conduit en ce lieu.
Vous allez, de ce pas, quitter votre chaumière
Pour demeurer dans mon manoir ;
Et désormais, du matin jusqu’au soir,
Vous n’aurez plus rien d’autre à faire,
Suivant votre plaisir, qu’à bien boire et manger.

Or donc, voilà Jacquot et sa femme, et sa fille,
Et Jacquinet, et toute la famille
Qui, le soir même, vont loger
Dans le manoir de ce bon Sire.
Lecteur, vous avez trop d’esprit, d’entendement,
Pour qu’il soit important de dire
Combien fut grand l’étonnement
Des Jacquot arrivés dans ce logis superbe.
On n’y voyait que des tapis
Aussi mous que la plus douce herbe ;
Rideaux soyeux, meubles de prix ;
Quant aux mets, quant aux vins, le tout était exquis,
Et nos Jacquot étaient enchantés, éblouis…
Madame allait-elle à l’église,
Un laquais galonné, pas à pas, l’escortait :
Jacquot voulait-il sa chemise,
Vite, un valet de chambre humblement l’apportait.
Tout marchait pour eux à souhait,
Et la nappe était toujours mise.

Mais à propos de nappe, il faut ici pourtant
Que l’on sache, à quel prix, Jacquot et son épouse
Savouraient les plaisirs d’une vie aussi douce.
Voici tout le secret de leur luxe éclatant :
Parmi les plats nombreux qui garnissaient leur table
Figurait, à chaque repas,