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JACQUOT « LE BÛCHEUX. »

C’est celui-là, la-bas…— Ma femme, y penses-tu ?
Tu sais que le bourgeois ne veut pas qu’on y touche !

— Je le sais bien, Jacquot, mais ça me paraît louche ;
Crois-tu que le bourgeois nous l’aurait défendu
Si c’était fait pour notre bouche ?
Lève un peu le couvercle, au moins aurons-nous vu
Ce qu’il contient, alors je serai satisfaite
Et je retrouverai mon ancien appétit.

— Si ce n’est que cela qui cause ton dépit
Eh bien ! qu’il soit fait à ta tête.
Tiens, femme, approche et vois…

Tiens, femme, approche et vois…Et le pauvre d’esprit
Vous découvre le plat d’une main indiscrète ;
Mais à peine a t-il fait ce coup qu’une souris
En sort comme un éclair et trotte par la salle.
Jacqueline, Jacquot, et leurs filles, leurs fils
Courent après ; mais la bête détale
Plus vite qu’eux et gagne un petit trou
Qui se trouvait, je ne sais plus trop où.

Quand ça ne va pas bien, « ça va de mal en pire »
Dit un proverbe du vieux temps.
Ils couraient encor que le Sire
Apparut tout-à-coup devant nos pauvres gens.
Je vous laisse à penser quelle fut leur surprise
Lorsqu’il se mit, lecteurs, à faire ce discours :

Bonnes gens, j’ai voulu pendant quarante jours
Éprouver votre gourmandise,
L’épreuve me suffit, vous pouvez désormais,
Comme vous l’entendrez, agir en ce palais.
Il est à vous, votre sagesse
Vous a gagné cette largesse ;
Mais avant de quitter ces lieux, je veux pourtant
Vous montrer l’intérieur de ce grand plat d’argent,
Venez voir…

Venez voir…— Oh ! Monsieur, non, dit alors la femme,
N’en faites rien, je vous en prie à deux genoux,
Cela pourrait jeter un sort à mon époux…