beuglait le patient d’une voix à faire pleurer un tigre.
— Montrez votre langue, répondait impassiblement le docteur. Bon : vous avez bien fait, cher monsieur Greenhorn, d’être venu me trouver aujourd’hui, car dans huit jours je n’aurais plus répondu de vous. Vous allez suivre de point en point le régime que je vais vous prescrire.
Maître Killmany prenant alors sur la table une fiole et un de ses paquets, les remettait au patient qui les recevait avec les marques du plus profond respect.
— Vous prendrez tous les jours six bouillons de dinde, mon cher monsieur Greenhorn, de deux en deux heures, en commençant à six heures du matin, et vous mettrez dans chaque une cuillerée de la poudre minérale contenue dans ce paquet. Cette poudre a une vertu merveilleuse. Elle provient de carottes qui ne poussent qu’au Brésil où j’étais allé, il y a cinq ans, pour guérir Sa Majesté Don Pédro, d’un coup de soleil. Lorsque je fis la découverte de cette précieuse racine, j’avais été piqué par un serpent à sonnettes et je lui dois la vie. Vous n’oublierez pas non plus de vous graisser, soir et matin, le gras des jambes et des bras ainsi que les oreilles avec l’huile contenue dans cette fiole. Cela est de la dernière importance. En suivant rigoureusement ce traitement pendant six semaines, vous allez devenir aussi léger qu’à l’âge de quinze ans.
— C’est vingt-cinq piastres, monsieur Greenhorn.
Aussitôt que le patient s’était exécuté, le docteur Killmany lui souhaitait le bonjour, et l’accompagnait jusqu’à la porte, en lui disant pour adieu : n’oubliez pas de venir me revoir demain, mon cher monsieur, et tout ira bien, je réponds de vous.
Il y avait déjà un peu plus de deux ans que l’illustre et docte personnage pratiquait de la sorte, lorsqu’un beau jour il décampa sans tambour ni trompette, lais-