Aller au contenu

Page:Stevens - Contes populaires, 1867.djvu/164

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
149
LE PÈRE MATHURIN.

de leurs souliers de bœuf ;…… bref, des deux côtés les récriminations pleuvaient.

Le père Mathurin fit semblant de ne pas les entendre, et les visites et les veillées n’en continuèrent pas moins ; mais à mesure que l’hiver avançait, la bonne intelligence était en baisse.

Cependant l’hiver se passa tout doucement, sans éclat. On se contentait de murmurer tout bas ; une circonstance frivole en apparence vint rompre la glace.

Les travaux étaient déjà commencés à la campagne depuis deux ou trois semaines. Les deux gendres travaillaient au champ, et les femmes occupées à l’intérieur repassaient du linge.

Le père Mathurin assis contre le poële, semblait converser avec un vieux chien aveugle couché à ses pieds le long du foyer.

Soit maladresse, soit intention, une des femmes vint à laisser tomber de l’eau bouillante sur le dos de l’animal, et la pauvre bête échaudée se mit à crier comme un goret qu’on égorge.

En attendant les cris plaintifs d’un vieil ami qu’il aimait beaucoup, le vieillard n’y tint plus et reprocha âcrement à sa fille ce manque d’attention.

Les deux femmes se mirent alors à dire tout ce qu’elles gardaient sur le cœur : qu’il n’y avait pas moyen de faire la moindre chose autour du poële, que le vieux et son chien écœurant étaient toujours collés dessus ; qu’on les avait emboucannés tout l’hiver, que la maison était toujours pleine d’étrangers qui mettaient tout sans dessus dessous, que c’était ci, que c’était ça, et l’on finit par appeler le bonhomme un vieux déplaisant.