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Page:Stevens - Contes populaires, 1867.djvu/166

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LE PÈRE MATHURIN.

je serais curieux de savoir comment ils seront traités ceux-là.

Je plaçai donc, autour de la cage, des fétus de paille que j’enduisis d’une glu épaisse, et en moins d’un quart-d’heure, je tins mes deux oiseaux que j’enfermai à leur tour, après avoir donné aux autres la clef des champs.

Il advint ce que je pensais. Pas un des petits ingrats ne songea à apporter la becquée aux malheureux prisonniers. Le deuxième jour, vers le soleil couchant, la mère mourut ; le lendemain, en me levant au petit jour, j’allai à la cage, le père était mort. Cela m’indigna. Comme je donnais cours à de tristes réflexions, j’entendis au-dessus de ma tête, dans les branches des ormes, le caquet bruyant de quelques merles. Je levai les yeux : ils étaient six. Je crus reconnaître les ingrats qui ricanaient sur la tombe de leurs parents. Furieux, j’allai quérir mon fusil, et les abattis tous les six du même coup. Je vous garantis que je les ai croqués, à mon déjeuner, sans remords. Eh ! bien, père Mathurin, mon histoire de merles est quelque peu l’histoire de beaucoup d’enfants ingrats. Si vous m’eussiez consulté dans le temps, vous ne vous seriez pas donné de la sorte et vous vous seriez gardé une pomme pour la soif. Un homme dont on n’a plus rien à attendre et qui vous pèse sur les bras, voyez-vous, est un fardeau bien lourd. Mais enfin, le mal est fait, et ça ne servirait de rien d’en parler davantage. Quand le vin est tiré il faut le boire, et puisque vous avez commis une faute, il s’agit de la réparer. J’ai un moyen bien simple et qui réussira, j’en suis presque convaincu. Il est évident que c’est l’amour de l’argent et de l’intérêt qui a fait oublier à vos gendres le respect et les égards qu’ils vous doivent ; eh bien ! nous les prendrons par l’intérêt et l’amour de l’argent. Écoutez