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LE PÈRE MATHURIN

bien : vous allez vous en retourner chez vous, et faites comme par le passé. Sur le coup de midi, quand vous serez tous à table, je m’en viendrai avec un sac de piastres françaises, nous passerons tous deux dans votre chambre, nous les compterons bien haut en parlant tout bas, puis vous ferez semblant d’ouvrir et de fermer votre coffre ; après quoi je partirai et vous vous remettrez à table. Ils entendront naturellement le bruit des écus, et s’il vous demandent d’où vous est venu tout cet argent, vous n’avez qu’à leur dire qu’il provient de la vente d’une terre que vous vous étiez réservée. S’ils se laissent prendre à ce piège, comme je n’en doute pas, vous verrez du changement, sous peu, dans leur manière d’agir à votre égard.

Ce qu’avait prévu le père Sanschagrin arriva de point en point.

Tandis que les deux vieillards renfermés dans la chambre du fond comptaient et recomptaient, en ayant soin de les faire sonner bien fort, le fameux sac aux piastres françaises, les deux gendres et leurs femmes, l’oreille collée contre la porte, tâchaient de surprendre ce qui se passait à l’intérieur.

Dès que le père Sanschagrin fut parti et que le bonhomme Mathurin se fut remis à table, les deux femmes prenant leur voix la plus douce et la plus caline dirent en souriant :