pour s’en servir en guise d’oreiller, quand l’envie le prit de regarder à la fenêtre.
Elle donnait sur la rue, et de cette espèce d’observatoire il pouvait voir tout ce qui se passait chez lui, car il y avait de la lumière.
Jean se mit donc à regarder.
C’était bien là son logis. Rien n’avait été changé depuis son départ. Le lit était encore à la même place avec le même couvre-pied bariolé et les mêmes rideaux. Son fusil pendait toujours à la poutre du milieu, et son violon se trouvait accroché au-dessus de la cheminée, avec son archet, comme la veille de son départ. Deux chandelles brûlaient sur la table, la nappe était mise et sa femme passait et repassait dans la chambre d’un air affairé.
Tandis que Jean Lafortune se mettait l’esprit à la torture pour comprendre ce que voulaient dire ces préparatifs de fête, car évidemment ce n’était pas lui qu’on attendait, un homme de haute taille, enveloppé d’un grand manteau noir, traversa la rue, monta le perron, ouvrit familièrement la porte sans frapper, et se dirigea tout droit vers sa femme qu’il embrassa.
À cette vue un nuage passa sur les yeux de Jean. Tous les serpents de la jalousie le mordirent au cœur.
Sa première pensée fut de s’armer d’une hache, d’entrer chez lui comme un ouragan ; mais en ce moment, les paroles du sage vieillard lui revinrent à l’esprit :
et Jean se coucha.