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Page:Stevens - Contes populaires, 1867.djvu/261

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LES TROIS FRÈRES

À cette lettre qui semblait plutôt venir d’outre-tombe que d’outre-mer, Alfred répondit avec des compliments dictés par le sentiment des convenances ; Théodore au contraire, tout entier à la joie de presser dans ses bras ce cher absent dont il portait le deuil depuis longues années, mit dans sa réponse tout ce que peut inspirer l’affection fraternelle la plus vive, et toute l’effusion possible d’un bon cœur.

Il avait bien raison, chers lecteurs, le poëte qui a dit :

L’argent, chez les mortels est le souverain bien,
C’est par lui qu’on arrive au but qu’on se propose,
Avec un peu d’argent un homme est quelque chose,
Un homme sans argent est un peu moins que rien.

L’or en effet, a une singulière puissance ici-bas. Il éblouit, il fascine. Un richard fut-il trois fois sot, et mal bâti par dessus le marché, on lui trouvera beaucoup d’esprit, et la plus agréable tournure du monde.

Un homme sans argent, au contraire, aurait beau avoir de l’esprit, du génie même, on ne daignera pas s’en apercevoir, et on le considérera volontiers comme le bipède le plus affreux, le plus monstrueux que la nature ait pu produire dans un moment de mauvaise humeur. Tout le monde le fuit, même ses proches, comme un pestiféré, car chacun craint qu’il veut emprunter de l’argent, et je crois même que sans la sensibilité si connue des tailleurs, il serait réduit le plus souvent à s’habiller de feuilles de figuier, à l’instar de nos premiers parents.

Mais nous voilà loin de l’oncle Jules. Revenons-y lecteurs, c’est bien le moins que nous lui devions après