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Page:Stevens - Contes populaires, 1867.djvu/49

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PIERRE CARDON.

rougis pouvaient laisser soupçonner qu’il avait pleuré. Le digne Malandrin, qui avait appris la mort de l’enfant, se douta tout de suite que ces larmes provenaient des remords, qui dûrent bourreler la conscience de son misérable ami, à la vue du désespoir de sa femme. Sans lui donner le temps de réfléchir, il lui persuada aisément que sa position était très-grave, que le monde allait gloser, que le beau-père reviendrait à la charge, et que par conséquent il valait infiniment mieux pour lui et tout le monde, laisser passer l’orage et se tenir à l’écart.

Ce reste de pudeur qui survit dans les cœurs même les plus avilis, les plus dégradés, criait bien hautement au pauvre Pierre que sa conduite était infâme ; mais malheureusement, au lieu de rompre à jamais avec celui qui l’avait entraîné dans le vice, il se laissa encore gagner et le suivit de nouveau à la ville, oubliant ainsi ses plus saints engagements.

Il est bien rare qu’un malheur vienne seul. Trois semaines environ après la fuite de son mari, Madame Cardon vit arriver chez elle les gens de loi qui firent main-basse sur le magasin et le mobilier de la maison.

La pauvre jeune femme ne put résister à tant de secousses. Elle rentra brisée, malade de corps et d’esprit, sous le toit paternel, et mourut aux dernières feuilles en priant Dieu de pardonner à son époux absent.