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Page:Stevens - Contes populaires, 1867.djvu/85

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LES DEUX VOISINS.

prochement excessif des maisons qui tendent de plus en plus à s’accaparer mutuellement l’air et le soleil, — ce qui permet parfois presqu’à tout un quartier de faire la « causette » sans quitter sa fenêtre ou sa galerie, — Dieu sait combien ce rapprochement engendre de petites et de grosses médisances, de laids et méchants petits cancans, de vilaines querelles, et partant des proçaillons, des procès, de grosses inimitiés qui finiraient par se transmettre de génération en génération et rappeler celles des Guelfes des Gibelins, s’il n’y avait pas fort heureusement dans le cours de l’année deux époques que l’on observe à l’instar des plus grandes fêtes, auxquelles il est permis de déménager ses meubles et ses rancunes.

Mais il est temps de revenir à nos moutons, ou plutôt à nos deux voisins, à nos deux braves pères de famille avec lesquels nous allons lier connaissance, en commençant par dire un mot de leurs maisons.

Celui qui demeurait le plus près de la ville, et que nous appellerons le voisin Pierre, s’était fait bâtir, dès son entrée en ménage, une grand maison de pierre à trois étages, quelque chose de bien régulier, bien aligné et bien froid, parlant à l’œil par la symétrie et très-peu au cœur par l’ensemble ; — avec écurie, remise et autres dépendances. Du reste pas un arbuste, pas une fleur, pas même un brin d’herbe dans la cour assez spacieuse que l’on aurait pu transformer aisément en jardin.

Celui qui demeurait à deux arpents de là, et que nous appellerons le voisin Jean-Baptiste, occupait une de ces bonnes vieilles maisons comme savaient si bien en bâtir nos ancêtres. Il n’y avait rien de prétentieux dans cette demeure au toit moussu, beaucoup plus longue que haute et presqu’enfouie dans une véritable forêt d’arbustes odorants et de plantes grimpantes allant enrouler leurs bras capricieux jusqu’au sommet des