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LVIII.

LES DEUX LÉZARDS.


Sur un mur caressé par la douce chaleur
D’un soleil printanier réveillant la nature,
Se promenaient à l’aventure
En devisant avec ardeur
Deux malheureux lézards sortis de leur torpeur.
« Hélas ! disait l’un d’eux, d’un accent pitoyable,
« Quelle triste condition !
« Que notre sort est méprisable !
« Nous vivons, voilà tout. Dans la création
« Nous n’avons aucun rang. La nature cruelle
« Fut injuste envers nous. Eh ! pourquoi, s’il vous plaît,
« Ne pourrions-nous voler ainsi que l’hirondelle ?…
« Elle nous fait ramper, la marâtre qu’elle est !
« Nous sommes cependant tous égaux devant elle.
« N’a-t-on pas dit cent fois qu’ici-bas l’animal,
« Même le plus petit de la nature entière,
« A ses droits au soleil, aux produits de la terre,
« Autant que l’homme, ce brutal
« Qui tue et détruit tout !… Souvent il nous écrase
« Sans motif, par plaisir… que dis-je ! Ses enfants
« Portent déjà l’audace
« Jusqu’à suivre sa trace
« Et nous faire souffrir mille et mille tourments.
« Que ne suis-je né cerf ?… d’une course légère
« Je pourrais au moins me soustraire