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Une autre se chantait sur mon air favori : « La maison d’Airlie » :

Un jour le duc d’Argyle siégeant au tribunal,
Commande qu’on lui serve un Stewart à dîner.

On y trouvait ces vers :

Le duc ayant alors mandé son cuisinier :
« Je ne puis, lui dit-il, souffrir que l’on me pense
Capable de vouloir jamais nourrir ma panse
Du sang de cette race et de m’en saouler ! »

Quoi qu’il en soit, James était condamné à mort et on pouvait le tenir pour aussi bien perdu que si le duc avait pris un canon et l’avait braqué sur lui. Pour moi, qui savais d’avance le dénouement, les détails du procès avaient moins d’intérêt ; mais le public, qui n’était pas dans les confidences, fut vivement choqué des scandales qui se déroulèrent au cours de la procédure. D’abord, cette exclamation d’un juré interrompant la plaidoirie de Colstoun : « Je vous en prie, monsieur, soyez bref, nous sommes tous fatigués,… » qui sembla le comble de la naïveté et du cynisme.

Mais les hommes de loi furent encore plus choqués d’une innovation qui avait discrédité et vicié les débats : l’un des témoins n’avait pas été cité. Son nom figurait pourtant sur la liste, on pouvait le voir à la quatrième page : « James Drummond, alias Mac Gregor, alias James More, ancien fermier à Inveronachile » ; sa déposition avait été prise, selon l’usage, par écrit, « il s’était souvenu de faits » (on les avait inventés, Dieu lui pardonne !) qui ne pouvaient qu’augmenter les charges contre James Stewart et qui, je le devinais, allaient grandement diminuer celles qui existaient contre lui-même. Il était donc très avantageux de porter son témoignage à la connaissance de la Cour, sans pour cela exposer l’homme lui-même à des contradictions publiques.

D’une manière aussi nouvelle qu’habile, ce fut atteint. La déposition de James More fut passée à la Cour en