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mes oreilles. Je ne peux rien voir au delà, Milord. Telle est la manière dont je suis fait. Si le pays doit tomber, il tombera. Et je prie Dieu, si ceci est un aveuglement opiniâtre, de m’éclairer avant qu’il soit trop tard. »

Il m’avait écouté sans bouger et après un silence :

« Voici un obstacle inattendu », dit-il tout haut, mais comme se parlant à lui-même.

— Et comment Votre Excellence va-t-elle disposer de moi ? demandai-je.

— Si je voulais, vous savez que vous pourriez aller dormir en prison ?

— Milord, j’ai dormi dans de pires endroits.

— Eh bien, mon garçon, une chose ressort de notre entrevue, c’est que je puis compter sur votre parole. Jurez-moi que vous garderez le secret, non seulement sur ce qui s’est passé ce soir, mais sur tous les faits du meurtre d’Appin, et je vous laisse libre.

— Je vous le jure jusqu’à demain ou un jour prochain qu’il vous plaira d’indiquer, répondis-je ; je ne voudrais pas paraître trop entêté, mais si je vous donnais ma parole sans conditions, Votre Excellence aurait atteint son but en me fermant la bouche.

— Je n’ai pas l’intention de vous tromper, dit-il.

— J’en suis sûr, repris-je.

— Voyons, demain est dimanche : venez ici lundi à huit heures du matin et donnez-moi votre parole jusque-là.

— J’y consens volontiers, Milord, et quant aux paroles qui sont tombées de votre bouche, je vous jure de n’en rien répéter aussi longtemps qu’il plaira à Dieu d’épargner vos jours.

— Vous remarquerez que je n’ai pas employé les menaces ?

— J’ai reconnu là la noblesse de Votre Excellence, mais