Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/188

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Il met donc les trois guinées du Roi dans la main de cet homme, comme si c’était son habitude.

Les trois autres, qui le suivaient, en font autant, et alors les voilà dans la rue, sans un penny pour toute la peine qu’ils s’étaient donnée.

Les uns disent que ce fut un tel qui donna le premier un pourboire au portier du Roi, les autres disent que ce fut un tel, mais la vérité c’est que Duncan Stewart fut le premier, et je suis prêt à le prouver à l’épée ou au pistolet. Et voilà l’homme que j’ai eu pour père. Que Dieu lui donne le repos !

— Je pense qu’un tel homme n’a pas dû vous léguer une fortune, dis-je.

— Ah ! c’est vrai. Il m’a légué des culottes pour me couvrir, et pas grand’chose de plus. C’est ce qui fait que je me suis engagé, ce qui était même, au bon temps, une tache noire sur ma réputation, et ce qui n’arrangerait guère mes affaires, si je tombais aux mains des habits rouges.

— Comment, m’écriai-je, vous avez été dans l’armée anglaise ?

— J’y ai servi, dit Alan, mais j’ai déserté pour aller du bon côté, à Preston Pans, et cela me réconforte un peu.

Il m’était difficile de partager cette manière de voir, je regardais la désertion sous les armes comme une impardonnable faute contre l’honneur.

Mais si jeune que je fusse, j’étais trop avisé pour dire ce que je pensais.

— Ah ! cher ami, dis-je, mais c’est la peine de mort.

— Oui, fit-il, si on mettait la main sur moi, ce serait l’affaire d’une courte séance et d’une longue corde. Mais j’ai dans ma poche ma commission du Roi de France, et cela me protégerait quelque peu.