Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/322

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mais j’enrageais de voir qu’il comptait sur mon empressement.

C’étaient là les deux choses qui pesaient le plus sur mon esprit, et je ne pouvais parler ni de l’une ni de l’autre sans manquer grossièrement de générosité.

Je fis donc ce qu’il y avait de pire après cela, je ne dis rien, et je ne jetai pas même un regard à mon compagnon, si ce n’est du coin de l’œil.

À la fin, quand nous fûmes sur l’autre rive du Loch Errocht, comme nous traversions un endroit plat et semé de roseaux, où la marche était facile, il ne put y tenir plus longtemps et se rapprocha de moi.

— David, me dit-il, ce n’est pas de cette façon qu’on doit prendre un petit accident, entre amis. J’avais à vous dire que j’en suis fâché, voilà qui est dit. Et maintenant, si vous avez encore quelque chose sur le cœur, vous feriez mieux de le dire.

— Oh ! répondis-je, je n’ai rien.

Alan parut déconcerté, ce qui me causa une certaine joie basse.

— Non, dit-il, avec un certain tremblement dans la voix, mais enfin quand je vous dis que c’était moi qui méritais le blâme.

— Pour cela, oui, naturellement, vous étiez dans votre tort, répliquai-je avec froideur, mais vous reconnaîtrez que je ne vous ai jamais fait de reproche.

— Jamais, fit-il, mais vous savez bien que vous avez fait pis que cela. Devons-nous nous séparer ? Vous en avez déjà parlé une fois.

Êtes-vous prêt à le redire ?

Il y a des collines et des bruyères en étendue suffisante, d’ici aux deux mers, et je vous avouerai, David, que je ne tiens pas à rester là où on n’a pas besoin de moi.