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L’ÎLE AU TRÉSOR

vivacité et se disputaient presque ; mais il ne me parvenait aucun mot distinct.

À la fin, les deux hommes firent halte, et probablement ils s’assirent, car non seulement ils cessèrent de se rapprocher, mais les oiseaux mêmes s’apaisèrent peu à peu et retournèrent à leurs places dans le marais.

Et alors, je m’aperçus que je négligeais mon rôle. Puisque j’avais eu la folle témérité de venir à terre avec ces sacripants, le moins que je pusse faire était de les espionner dans leurs conciliabules, et mon devoir clair et évident était de m’approcher d’eux autant que possible, sous le couvert propice des arbustes rampants.

Je pouvais déterminer fort exactement la direction où se trouvaient les interlocuteurs, non seulement par le son des voix, mais par la conduite des derniers oiseaux qui planaient encore, effarouchés, au-dessus des intrus.

M’avançant à quatre pattes, je me dirigeai vers eux, sans dévier, mais avec lenteur. Enfin, par une trouée du feuillage, ma vue plongea dans un petit creux de verdure, voisin du marais et étroitement entouré d’arbres, où Long John Silver et un autre membre de l’équipage s’entretenaient tête à tête.

Le soleil tombait en plein sur eux. Silver avait jeté son chapeau près de lui sur le sol, et il levait vers son compagnon, avec l’air de l’exhorter, son grand visage lisse et blond, tout verni de chaleur.

— Mon gars, disait-il, c’est parce que je t’estime au poids de l’or… oui, au poids de l’or, sois-en sûr ! Si je ne tenais pas à toi comme de la glu, crois-tu que je serais ici occupé à te mettre en garde ? La chose est réglée : tu ne peux rien faire ni empêcher ; c’est pour sauver ta tête que je te