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LE CAPITAINE SILVER

qu’il aille au diable, qu’il dit, je n’en ai cure : nous sommes fatigués de lui… » Ce sont là ses paroles.

— Est-ce tout ?

— Oui, c’est tout ce que tu dois savoir, mon fils.

— Et maintenant, il me faut choisir ?

— Et maintenant, il te faut choisir, crois-moi.

— Eh bien, je ne suis pas assez sot pour ne pas très bien savoir ce que j’ai à attendre. Quoi qu’il doive m’arriver, cela m’est égal. J’en ai trop vu mourir depuis que je vous ai rencontré. Mais il y a deux ou trois choses que je dois vous raconter, dis-je, très surexcité à ce moment. Voici la première. Vous êtes dans une mauvaise passe : navire perdu, trésor perdu, hommes perdus : toute votre entreprise a fait naufrage ; et si vous voulez savoir à qui vous le devez, eh bien, c’est à moi ! J’étais dans la barrique de pommes le soir de notre arrivée en vue de terre, et je vous ai entendus, vous John, et vous Dick Johnson, et Hands, qui est présentement au fond de la mer, et j’ai répété sur l’heure jusqu’à la dernière de vos paroles. Et quant à la goélette, c’est moi qui ai coupé son câble, et c’est moi qui ai tué les hommes que vous aviez à son bord, et c’est moi qui l’ai menée là où aucun de vous ne la reverra jamais. Les rieurs seront de mon côté ; j’ai eu, dès le début, la haute main sur vous dans cette affaire ; je ne vous crains pas plus qu’un moucheron. Tuez-moi ou épargnez-moi, à votre gré. Mais je vous dirai encore une chose : si vous m’épargnez, j’oublierai le passé, et quand vous passerez tous en jugement pour piraterie, je vous aiderai de tout mon pouvoir. C’est à vous de choisir. Tuez-en un de plus sans profit pour vous, ou épargnez-moi et gardez ainsi un témoin qui vous sauvera de la potence.