Page:Stevenson - Le Maître de Ballantrae, 1989.djvu/219

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aussi sûre que devant ; et je décidai de courir après Mylord.

– Êtes-vous fou ? m’écriai-je, dès que je l’eus rattrapé. Laisserez-vous passer une aussi belle occasion ?

– Se peut-il que vous le croyiez encore ? demanda Mylord, ricanant à demi.

– Je voudrais tant qu’il sorte de la ville ! m’écriai-je. Je voudrais le savoir n’importe où, mais pas ici !

– J’ai dit mon avis, répliqua Mylord, et vous le vôtre. Cela suffit.

Mais je tenais à faire déguerpir le Maître. L’avoir vu reprendre patiemment ses travaux d’aiguille en était plus que je ne pouvais digérer. Personne au monde, et le Maître moins que tout autre, n’était capable de supporter une telle série d’outrages. Il y avait du sang dans l’air. Et je me jurai de ne rien négliger qui fût en mon pouvoir, s’il en était encore temps, pour détourner le crime. Ce même jour, donc, j’allai trouver Mylord dans son cabinet de travail, où, il était à écrire.

– Mylord, dis-je, j’ai trouvé un bon placement pour mes petites économies. Malheureusement, je les ai laissées en Écosse ; il faudrait du temps pour les faire venir, et l’affaire est urgente. Y aurait-il moyen que Votre Seigneurie m’avançât la somme, sur ma signature ?

Il me lança un regard scrutateur.

– Je n’ai jamais mis le nez dans vos affaires, Mackellar, dit-il. Outre le montant de votre caution, vous ne devez pas valoir un farthing, que je sache.

– J’ai été longtemps à votre service, sans jamais dire un mensonge, ni vous demander une faveur pour moi, jusqu’à ce jour.

– Une faveur pour le Maître, répliqua-t-il tranquillement. Me prenez-vous pour un idiot, Mackellar ? Comprenez une fois pour toutes que je traite cette bête féroce à ma manière ; la crainte ni la prière ne peuvent m’en détourner ; et il faudrait pour me duper un leurre moins transparent que le vôtre. Je demande à être servi loyalement ; et non à ce que l’on manigance derrière