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DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE

tranquille, et en distribuant les attentions sur son chemin. Une fois arrivé à la hauteur de la table de jeu, il se plaça en face de madame de Rosen, et aussitôt qu’il eut rencontré son regard il se retira dans l’embrasure d’une fenêtre. Là, elle vint promptement le rejoindre.

— Vous avez bien fait de m’appeler, dit-elle d’un air un peu égaré. Ce jeu sera ma ruine !

— Ne jouez plus ! dit Othon.

— Ne plus jouer ! s’écria-t-elle en riant. Mais c’est ma destinée ! Ma seule chance était de mourir poitrinaire, maintenant il faudra que je meure dans un grenier.

— Vous êtes d’humeur amère, ce soir, dit Othon.

— J’ai perdu, répliqua-t-elle. Vous ne savez pas, vous, ce que c’est que la cupidité !

— Alors, il paraît que j’arrive mal à propos ? dit-il.

— Ah ! c’est quelque faveur que vous désirez de moi ? dit-elle en se ranimant d’un air délicieux.

— Madame, dit-il, je songe en ce moment à fonder un parti, et je viens essayer de vous enrôler.

— C’est tout fait dit la comtesse. Ah ! me voilà homme, de nouveau !

— J’ai peut-être tort, dit-il, mais je crois, du fond du cœur, que vous ne me voulez pas de mal.

— Je vous veux tant de bien que je n’ose pas vous dire combien, répondit-elle.

— Si, alors, je vous demandais une faveur ?…

— Demandez, mon prince, demandez ! répliqua-t-elle. Quelle qu’elle soit, elle vous est accordée.

— Je voudrais, dit-il, que vous fissiez de moi,