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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

seule avec cette honte, je meurs ici. — Il poussa un gémissement, — Oh ! continua-t-elle, songez à ce que je souffre ! Si vous souffrez, vous, pour un sentiment de délicatesse, imaginez ce que je dois souffrir, moi, dans ma honte ! Refuser ce rebut ! Vous aimez mieux voler, vous avez si si mauvaise opinion de moi ! Vous aimez mieux me piétiner le cœur ! Ô cruel ! Ô mon prince ! Othon ! Ayez pitié !…

Elle le serrait toujours entre ses bras ; rencontrant sa main, elle la couvrit de baisers. Alors Othon commença à sentir la tête lui tourner. — Oh ! s’écria-t-elle de nouveau, je comprends ! Ah ! quelle horreur ! C’est parce que je suis vieille… parce que je ne suis plus belle ! Elle éclata en sanglots.

Ce fut là le coup de grâce. Othon dut alors l’apaiser, la consoler du mieux qu’il put. Et, sans beaucoup plus de paroles, l’argent fut accepté. Entre cette femme et l’homme faible le résultat était inévitable. Madame de Rosen calma ses sanglots sur l’instant. D’une voix agitée elle le remercia, et reprit sa place sur le banc, loin d’Othon. Maintenant — dit-elle — vous comprenez pourquoi je vous ai prié de placer votre voleur à distance, et pourquoi je suis venue seule. Ah ! combien j’ai tremblé pour mon trésor !

— Madame, dit Othon, d’un accent plaintif, épargnez-moi ! Vous êtes trop bonne… trop noble.

— Je m’étonne de vous entendre, répliqua-t-elle. Vous avez évité une folie dangereuse. Vous pourrez maintenant recevoir votre brave vieux