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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

Killian s’y trouvait déjà, sec et raide dans ses habits du dimanche : un notaire de Brandenau montait la garde auprès de ses papiers étalés. Le palefrenier et l’hôtelier furent appelés pour servir de témoins. La déférence marquée de ce gros personnage surprit visiblement le vieux fermier ; mais ce ne fut que lorsque Othon eut pris la plume et signé son nom, que la vérité éclata dans son esprit. Alors il fut hors de lui.

— Son Altesse, cria-t-il, Son Altesse !… Et il continua à s’exclamer de la sorte jusqu’à ce que son intelligence eût enfin réussi à saisir la situation. Il se retourna alors vers les témoins. — Messieurs, leur dit-il, vous vivez dans un pays hautement favorisé de Dieu ; car de tous les généreux gentilshommes, je l’affirme sur ma conscience, celui-ci est le roi. Je suis vieux, et j’ai vu bien des choses, bonnes et mauvaises… j’ai vu l’année de la grande famine… mais un plus excellent gentilhomme, non, jamais !

— Ça, nous le savons, dit l’hôtelier. Ah ! oui, nous savons ça en Grunewald ! Nous ne demanderions qu’à voir Son Altesse plus souvent !

— Le meilleur prince… commença le palefrenier. Mais il s’arrêta tout à coup, étouffant un sanglot ; sur quoi chacun se retourna, étonné, pour observer cette émotion ; Othon tout le premier, frappé de remords à la vue d’une reconnaissance pareille.

Puis ce fut le tour du notaire de tourner son compliment. — Je ne sais, dit-il, ce que la Providence peut tenir en réserve, mais ce jour-ci sera sans doute compté comme un des plus beaux dans